mercredi 16 juin 2010

Religions et esprits 1 : Shinto, Bouddha, Tao, Feng Shui...



Une civilisation du « et »

L’occident est une civilisation du « ou » : toute nouvelle idéologie, tout axiome semble devoir éliminer les autres pour s’affirmer. Les opposés ne peuvent pas s’allier et tout ce qui n’est pas « avec » devient « contre » : on est blanc ou noir, patron ou travailleur, UMP ou socialiste, PSG
ou OM, catholique ou protestant, etc… Le Japon est une civilisation du « et » : les contraires cohabitent et ont même besoin l’un de l’autre pour s’équilibrer (yin et yang), les systèmes d’idées se juxtaposent. Les japonais adorent la tradition et l’hypermodernité à la fois. En art, le théâtre est accompagné de musique et de danse. L’écriture japonaise résulte d’une juxtaposition de plusieurs systèmes, et même le repas japonais est constitué d’un ensemble de petits éléments pour le goût et pour les yeux. Syndicats et patronat s'unissent pour améliorer la compétitivité des entreprises.
Il en est de même avec la religion et la philosophie : une juxtaposition dont résulte un panthéon d’une richesse et d'une complexité incroyables.
Dès le Moyen-âge, 6 sectes bouddhistes (rokushuu) puis 8 et ensuite 12, cohabitèrent avec le shintoïsme et les doctrines taoïstes et confucianistes sous le principe de « pluralité des valeurs ».
Quand au XVIe siècle, les missionnaires jésuites portugais s’installèrent au Japon, ils furent d’abord accueillis à bras ouverts (surtout qu’ils apportaient plein d’innovations, dont les armes à feu !), mais dès qu’ils tentèrent d’imposer leur religion comme unique et excluant les autres, le gouvernem
ent japonais les expulsa, déclenchant un repli de l’archipel nippon sur lui-même de près de deux siècles et demi.


Shintoïsme

La plus a
ncienne religion du Japon, le Shintoïsme, ou « voie qui mène aux dieux » est en fait un ensemble de croyances animistes.
Le concept majeur est le caractère sacré de la nature et la place de l'homme dans l'univers comme simple élément d’un grand Tout. Ainsi, un cours d'eau, un astre, une simple pierre ou même des notions abstraites comme la fertilité peuvent être considérés comme des divinités ou des Esprit, appelés Kami 神.

On n’en compte pas moins de huit cent myriades ! Il y en a partout, des gentilles, des moins gentilles, des très susceptibles… La divinité la plus importante est la déesse solaire Amaterasu (天照) litt. celle qui fait briller le ciel. Avec la refonte de la constitution en 1868 sous l'empereur Meiji, le Kokka shinto devint une religion d'État. Dès 1872, un Office du culte shinto (Jingikan) fut établi afin d’officialiser le culte et tous les prêtres devinrent des employés d'État. Chaque citoyen devait s'enregistrer comme membre de son sanctuaire local (ujiko). L'empereur du Japon, descendant de la déesse Amaterasu, chef de l'État et commandant suprême de la Marine et de l'Armée, devenait sacré lui aussi. Il fallut attendre le 1er janvier 1946, cinq mois après la capitulation pour que l’empereur Hiro Hito déclare, dans un discours d’humanité, renoncer à son statut divin et redevenir un simple mortel. Les rapports et influences entre Shintoïsme et Bouddhisme sont très étroits.


Bouddhisme
La Svatiska, symbole du Bouddhisme, représente l’amour et la compassion ! ne pas confondre avec la croix gammée hitlérienne qui tourne dans l’autre sens.

Le bouddhisme arrive au Japon au VIè siècle, et se répand doucement à travers les enseignements du bouddha Amida. Le bouddhisme Zen quand à lui devient la version élitiste et guerrière, conjuguant réflexion philosophique, méditation et ascèse et pratique des arts martiaux. Au cours de la période Nara, du Vie au VIIIè siècle, six écoles se disputent la suprématie et les temples commencent à fleurir. Parfois les moines se militarisaient pour défendre leurs terres. Quand la capitale du japon s’installe à Kyoto, les écoles passent au nombre de 8, puis 12.
Ce qui est frappant c’est cette capacité du bouddhisme d’accepter les autres religions, d’encourager le culte païen des kamis et de se développer
en pleine harmonie à côté du shintoïsme. Cela rend les japon
ais très perplexes par rapport aux guerres de religions, intégrismes et fondamentalismes chrétiens, juifs et musulmans.

Taoïsme

Le Tao (la Voie) importé de Chine, est une doctrine qui recherche la « sagesse originelle », par l’harmonie entre le cœur, l’esprit et la nature. En retournant à l’authenticité primordiale et naturelle, en réalisant l’unité finale du Yin et du Yang à travers la mort, l’homme se libère des contraintes sociales et corporelles pour transcender les limites du temps et de l’espace et que son esprit « chevauche les nuages ». Beaucoup de pratiques taoïstes, proches du yoga ou de rites chamaniques, sont basées sur la maîtrise du ki, l’énergie vitale, notamment par des techniques de respiration (ou plutôt d’apnée). Les techniques du tantrisme et notamment de sexualité en sont une branche.
Le seika tanden, zone située au bas de l’abdomen
, est le centre du Ki où se croisent tous les méridiens d’énergie. Ce principe du Ki régit autant l’homme et autres animaux que les plantes et même les éléments minéraux ; d’ailleurs beaucoup de principes taoïstes ont inspiré en parallèle une « alchimie externe » : transmutation du plomb en or, et une « alchimie interne » : transmutation de l’esprit et du corps par la « voie du cinabre ». Aujourd’hui les principes taoïstes sont encore très présents dans la médecine orientale, dans les techniques respiratoires de la méditation et du yoga, dans la pratique des arts martiaux et surtout dans la géomancie feng shui (voir ci-après). René Sieffert, Les religions du Japon, Plon, 2000

Feng Shui, le vent et l'eau
est un art issu du taoïsme chinois dont le but est d'harmoniser l'énergie (le ki) d'un lieu, afin de favoriser la santé, le bien-être et la prospérité de ses occupants. Le principe, basé sur la complémentarité yin-yang, est d’optimiser les flux de ki dans l’espace que l’on va habiter. Les parties yin d'une maison sont l'arrière du bâtiment (les chambres, salles de bains) et les parties yang sont à l’avant (séjour, cuisine, entrée, bureau).

Selon les écoles, le Nord est calculé, soit à la boussole, soit comme faisant face à l’ouverture principale de la maison. Les cinq éléments (bois, feu, terre, métal et eau) sont positionnés en fonction des axes cardinaux. Ce principe s’applique aux corps architecturaux : ville, temple ou maison, mais également au corps humain (acupuncture).


Kyoto, capitale Feng Shui

La géographie naturelle de Kyoto en fit une implantation Feng Shui idéale. Le site, une vaste plaine entourée de collines, est protégé par quatre dieux gardiens :

-un dragon bleu à l'est, -un tigre blanc à l'ouest, -un oiseau sacré au sud, et -le dieu des eaux vers le nord. Ces dieux sont convertis au moyen de la rivière Kamogawa à l'est, la route San-in do à l'ouest, l’étang Ogura dans le sud et le mont Funaoka au nord.

C’est du nord-est que les influences les plus malveillantes pouvaient être attendues (Demon Gate) et notamment du côté de la montagne aux deux sommets, le Mt Hiei. La ville de Kyoto s’en est parfaitement protégée en se blottissant derrière la rivière Kamogawa, et en érigeant au Nord-Est toute une série de temples bouddhistes, peuplés de moines guerriers, faisant rempart à cette « porte des démons ».





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1 commentaire:

  1. Patrick Renoux, géologue-geophysicien chez Geostock et grand spécialiste du Japon, me signale qu'il existe des kamidanas près des transformateurs électriques et même une déesse du pétrole, honorée par un temple près de Niigata,Yahiko jinja !

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